Qui de mieux pour connaitre les évolutions des activités du secteur que les directeurs en fonction depuis plus de 30 ans ?
Aujourd’hui, nous avons demandé à trois directeurs d’ETA (Alain Klinkenberg, Bernard Van Sandwyck, et Ladislas Nagant) de nous parler de l’évolution des activités de leur ETA.
Bernard van Sandwyck, à l’Atelier 85 depuis le 16 février 1987
- Peux-tu nous décrire les évolutions des activités que ton ETA a réalisé de sa fondation à maintenant ?
Avant 1987, nous avons fait de la menuiserie, de la maçonnerie, du fardelage, de mise sous film rétractable, de la cordonnerie, de la peinture en bâtiment, du garnissage (chaises, divans, …), de la couture et du montage électrique. Ce sont toutes des activités que nous avons arrêté au fil du temps. Par contre, nous réalisions aussi (et réalisons toujours) de l’horticulture, de la blanchisserie, de la ferronnerie et du conditionnement.
En 1989, nous nous sommes aussi lancé dans l’imprimerie d’enveloppes et la bonneterie, activités que nous avons arrêté respectivement en 1996 et 2003.
Et en 1992, nous nous sommes lancés dans la transformation du carton ondulé plaques et croisillons.
- Quels sont les éléments contextuels qui ont influés sur la création de nouvelles activités/ sur le changement d’activités/ sur l’abandon des activités que vous avez faites ou que vous faites encore dans votre ETA (développement d’un nouveau secteur de niche ? automatisation ? concurrence ? manque de client ? difficulté de recruter certains profils ? changement de localisation ? … ?).
Avant toute chose, en 1987, la subsidiation était bien différente. Nous avions 30 % de chiffre d’affaires pour 70 % de subsides. Aujourd’hui, c’est l’inverse.
Malgré cela, l’Atelier était en situation de faillite. Des métiers étaient organisés, sans pour autant en maîtriser tout le processus. Nous devions passer de l’occupationnel à la production d’entreprise.
L’Atelier s’était diversifié à outrance. Au fil des années, nous avons fermé :
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- Les secteurs du bâtiment que nous ne maîtrisions pas,
- Le montage électrique, la couture et la Bonneterie qui se sont délocalisés.
- Le garnissage, la cordonnerie et l’imprimerie au départ du dernier travailleur du secteur.
- Le métier du film rétractable où nous étions en trop forte concurrence avec d’autres ETA.
En parallèle, nous avons renforcé l’horticulture, la blanchisserie et la ferronnerie.
L’arrêt du ‘’film rétractable’’, ensuite, l’arrêt de la couture et de la bonneterie, et enfin, celui du montage électrique, ont laissé place à la transformation du carton ondulé et son conditionnement. Cela représente maintenant plus des 2/3 de notre production.
Les métiers que nous avons développés nous permettent d’employer des personnes dont la perte de rendement est importante :
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- Avec un encadrement dont la formation peut se faire en interne,
- Pour de nombreux clients (+/- 600 actifs),
- Engendrant une valeur ajoutée importante,
- sans trop de concurrence d’autres ETA.
- Quelles sont les activités/travaux les plus originaux ou insolites que ton ETA a réalisé ?
- Confection du garnissage pour des cercueils (pendant 30 ans).
- Fabrication de boîtes en carton pour réaliser un emballage cadeau de voitures ‘’Renault Megane’’ lors de la présentation d’un nouveau modèle chez les concessionnaires belges.
- Réalisation de toutes les illuminations de Noël pour la commune de Florennes par la ferronnerie.
Ladislas Nagant, engagé à l’Atelier St Vincent en février 1988
- Est-ce que tu peux nous décrire les évolutions des activités que ton ETA a réalisé de sa fondation à maintenant ?
L’Atelier Protégé a été créé en 1974. Les locaux se situaient dans les caves d’un ancien orphelinat. Dans ces caves subsistait la buanderie de l’orphelinat. D’où l’idée de lancer une activité nettoyage de linge. Très vite la place vint à manquer et en 1984 était inauguré un nouvel Atelier avec les activités suivantes : blanchisserie, nettoyage à sec, couture, cordonnerie, gravure, car wash. En 2002, suite à un incendie qui ravagea complètement les locaux, l’idée fut de se recentrer complètement sur l’activité de blanchisserie. En 2005 un nouvel Atelier était inauguré, essentiellement consacré à la blanchisserie pour l’Horéca d’une part ( hôtel-restaurant-gîte) et l’industrie d’autre part ( entretien de tous type de vêtements de travail ainsi que la location et la vente). Nous sous-traitons toute la partie nettoyage à sec à nos collègues de l’Atelier 85 à Florennes. En 2016 nous avons procédé à un agrandissement de nos locaux et actuellement nous travaillons sur un nouveau projet d’agrandissement.
- Quels sont les éléments contextuels qui ont influés sur la création de nouvelles activités/ sur le changement d’activités/ sur l’abandon des activités que vous avez faites ou que vous faites encore dans votre ETA (développement d’un nouveau secteur de niche ? automatisation ? concurrence ? manque de client ? difficulté de recruter certains profils ? changement de localisation … ?).
Actuellement, en Province de Namur et de Luxembourg le nombre de blanchisserie industrielle se réduit. La demande de service est plus importante que l’offre. Nous ne pouvons répondre à toutes les demandes de clients. Une des difficultés actuelles est le recrutement de personnel de production, avec profil adéquat, en condition AViQ et autorisation ETA.
Alain Klinkenberg, Les Ateliers du Monceau depuis le 1er août 1985
- Peux-tu nous expliquer un peu l’évolution de ton ETA ?
Je suis arrivé le 1 août 1985 à la création des Ateliers du Monceau, je suis même sur la première page du registre du personnel ! Les Ateliers cherchaient quelqu’un qui ait assez de connaissance pour gérer une entreprise mais aussi connaissait la culture sourde. Professeur de mathématique ayant deux parents sourds, ils m’ont proposé le poste et j’ai accepté.
Les Ateliers comptaient au départ 7 ouvriers et se situait au parc artisanal de Monceau, d’où le nom des Ateliers.
Notre premier et unique client pendant 1 an et demi était une scierie dans laquelle on travaillait et pour laquelle on effectuait du tri de bois et de la caisserie.
En mars 87, la scierie a perdu des contrats et notre partenariat avec elle s’est arrêté. Nous avons dû partir de notre emplacement. Nous nous sommes alors installés à Grâce-Hollogne, nous avons investi dans des machines mais nous n’avions à l’époque, pas encore de client. A l’époque, c’était un réel pari, nous n’avions plus que l’équivalent d’un mois de salaire comme trésorerie. Au départ, les ouvriers ont principalement fait des travaux de conditionnement et de reconditionnement et de peinture. J’ai ensuite démarché une entreprise qui faisait des briques réfractaires et qui utilisait beaucoup de palettes. Je leur ai alors proposé de reprendre leurs palettes gratuitement (ce qui les arrangeait car on les en débarrassait), de les réparer et de leur revendre pour le 1/3 du prix, ce que l’entreprise a bien évidemment accepté. A cette époque, on ne parlait pas encore de recyclage ou d’économie circulaire, on était donc dans les premiers à faire cette activité.
J’ai ensuite réussi à démarcher Spa Monopole en leur proposant les mêmes services de réparation de de vente de palette. C’est comme ça que l’on a acquis un de nos plus grand client.
En parallèle du démarchage de SPA, nous avons également lancé une le service de location de palette.
Aujourd’hui, 3 millions de palettes transitent par nos Ateliers et environ 800.000 sont réparées.
Durant notre développement, nous avons également commencé une activité de couture pour les femmes des Ateliers. Nous nous occupions de réaliser des démonstrateur pour Tonton Tapis mais l’entreprise a connu des difficultés et le partenariat s’est arrêté. Après la perte de ce client, nous avons décidé d’arrêter l’activité de couture.
Nous avons également lancé une activité de fabrication d’emballages en bois.
Au niveau de la paletterie, d’autres entreprises se sont aussi positionnées sur le marché. Ceux-ci faisaient des palettes standardisées et utilisaient des machines pour les produire. Nous nous sommes donc intéressés à des palettes qui n’étaient pas de format standard et dont nos clients n’avaient besoin qu’en petites séries. Notre avantage dans ces cas-là, c’est que nous pouvons facilement nous adapter à la demande et rapidement. On a par exemple été le fournisseur principal de Cockeril Centre (Arcelor).
Vu notre expertise dans le bois, nous nous sommes également lancés pendant un temps dans l’usinage du bois pour les négociants et les vendeurs de parquets. Nous avons d’ailleurs nous-même réfléchi à nous lancer dans la vente mais nous ne disposions pas de showroom et ne voulions pas nous mettre en concurrence avec nos clients.
Fort de notre expérience en paletterie, nous nous sommes également lancés dans la fabrication de caisses à fruits (des pallox).
Nous avons également commencé à produire des panneaux acoustiques pour les autoroutes (un comble quand on sait qu’ils sont fabriqués par des personnes sourdes et malentendants !). Une manière de nous placer dans un marché de niche.
En 2008, la sidérurgie liégeoise et donc certains de nos grands clients, ont traversé de grosses difficultés. Nous avons alors cherché à nous diversifier encore plus et nous sommes lancés dans l’écoconstruction, toujours dans une démarche d’économie circulaire. Grâce aux aides de la DGO4 à une société à finalité sociale que nous avions créée, nous avons créé la gamme Cimède : des maisons évolutives en ossature bois. Le projet a vu le jour en 2012 et a eu pas mal de succès !
- Quelles sont les activités les plus originales ou insolites que ton ETA ait réalisées ?
Le pavillon belge pour l’expo universelle à Milan. Nous avions alors reçu un coup de fil d’un chef de chantier d’une entreprise spécialisée dans le bois. C’était un projet immense de l’entreprise BSIX: nous avons construit tout le palais en kit étant : un des rares à avoir respecté tous les délais, tous les cahiers des charges, … Et nous avions transmis une notice super claire pour le monter à Milan où il n’y a eu aucun souci !
Dans un autre registre, nous avons également déjà réalisé des caisses en bois destinés à l’exportation de veaux.
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